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école - Page 5

  • Le monde de l’absurde aide-t-il nos enfants ?

    Pour avoir giflé un élève, un professeur se retrouve en correctionnelle. Chaque jour, des élèves renversent des tables en classe, bousculent leurs enseignants, les frappent, leur crachent à la figure, les couvrent de bordées d’injures ; cela stimule les zygomatiques de tous leurs camarades, érige dans le même temps l’auteur de ces actes inqualifiables en héros des temps « modernes », et laisse notre société s’assoupir dans une quasi-indifférence généralisée, qui est à mes yeux une non-assistance à société en grand danger.

    Les adultes que nous sommes doivent-ils se sentir fiers d’avoir contribué à ce que nos enfants aient perdu le sens du respect de ceux qui ont pour mission de préparer l’avenir ? Qu’advient-il lorsque les enseignants ne sont plus respectés ? Le cerveau de leurs élèves, de manière tout à fait inconsciente, cesse d’engranger les savoirs que l’école tente de leur transmettre. Qui en est la principale victime ? La France, bien entendu !

    Voici les propos du secrétaire général du Syndicat National des Collèges et des Lycées, Bernard Kuntz, diffusés au journal de 13h de France Inter, le 31 janvier dernier : « Ce que je peux vous dire, c’est que partout en France, dans les établissements scolaires et pas seulement dans les établissements sensibles, les professeurs en ont assez. Ils ne supportent plus cette indiscipline constante, ces insultes, ces mauvais coups, cette impossibilité qui nous est faite actuellement de faire travailler nos élèves. Alors, à une époque où le Président de la République nous parle d’école du respect, on aimerait bien un peu que la société, dans son ensemble, et que le Gouvernement, en particulier, prenne de véritables mesures pour faire en sorte que nous puissions recommencer à accomplir la mission pour laquelle nous avons été recrutés, c’est-à-dire instruire nos élèves. »

    La semaine dernière, Valérie Pécresse a osé avancer qu’elle était favorable à l’évaluation des professeurs par les étudiants. Quel ministère dirige-t-elle donc ? S’est-elle plongée, avec un tant soit peu de sérieux, dans la réalité des difficultés auxquelles se trouve confronté notre système d’enseignement, et donc notre pays ?

    Même dans le sacro-saint univers des grandes écoles d’ingénieurs, le niveau ne cesse de se détériorer. Et ce n’est pas le déversement arbitraire dans les classes préparatoires de 5% de chacun des lycées de France, que vient d’annoncer le gouvernement, qui en relèvera le niveau. Prudente et anticipant la déconfiture, le ministre de l’enseignement supérieur annonce que tous ceux qui échoueront à intégrer une grande école se verront accorder une équivalence universitaire. Pourquoi donc envoyer dans des cursus réputés non complaisants (en termes de connaissances), des élèves qui ne détiendraient pas les capacités à en relever les exigences ? Augmenter dans une classe le nombre d’élèves qui peinent et sont à la remorque, aura une incidence sérieuse sur le programme que l’enseignant pourra, en fin de compte, transmettre à l’ensemble de sa classe dans le temps imparti. C’est donc la totalité de la classe qui en paiera le prix, et la France par voie de conséquence.

    Il faut savoir qu’aujourd’hui en France, en deuxième année de certaines écoles d’ingénieurs (soit au stade bac+4), un nombre croissant d’élèves ne maîtrisent plus certaines notions fondamentales de mathématiques, qui leur sont indispensables et qui étaient, il y a encore dix ans, couramment maîtrisées par les élèves de terminale S ! Des notions sans lesquelles aucun ingénieur, dans les domaines technologiques en question, ne peut espérer remplir les missions qui lui seront confiées, et auxquelles sa formation aurait dû le préparer. La désillusion sera dure à encaisser, non seulement pour ces ingénieurs, mais aussi pour les industriels qui les auront recrutés.

    Où sont les courageux hommes politiques qui oseront s’attaquer sérieusement à la réalité des défis qui se posent aujourd’hui à l’enseignement en France ? Le premier de ces défis sera de faire en sorte que les élèves redeviennent des élèves. Voici à ce sujet un extrait du Puzzle de l’intégration : « Bien entendu, le service public de l’orientation n’est pas la maison des miracles ; il ne pourra venir en aide qu’à ceux qui auront respecté leur mission d’élèves au long de leur scolarité. »

    Catégories : Discrimination positive, Éducation - instruction, Insertion - intégration
  • Du rôle central de l’école maternelle dans l’Égalité des chances

    La « mission Bentolila » sur l’école maternelle a rendu son rapport au Ministre de l’Éducation nationale Xavier Darcos. Ce rapport a le mérite de placer l’école maternelle au centre de la discussion sur la réussite scolaire. Enfin, on reconnaît que l’égalité des chances se prépare dès la maternelle. On comprendra donc peut-être un jour que le chèque de 730 millions d’euros alloué à Valérie Pécresse pour diviser par deux, à l’horizon 2012, le taux d’échec des 52% d’étudiants dont le trop faible niveau les empêche de réussir d’emblée l’épreuve de vérité que constitue la première année universitaire, n’a guère de chance d’atteindre son objectif. Le « Plan réussite en licence » de Valérie Pécresse prévoit que « la licence sera également rénovée avec l’instauration d’une première année fondamentale davantage pluridisciplinaire et recentrée sur les fondamentaux ». Ce qui signifie en bon français que la première année universitaire servira désormais à dispenser les fondamentaux qui auraient dû être acquis auparavant par les étudiants ! À ce stade, ce qui est entrepris là n’est plus une tentative de sauvetage, mais un tour de magie digne de la bonne marraine de Cendrillon, capable de changer une citrouille en carrosse et des souris en splendides chevaux… Je considère pour ma part que pour la réussite scolaire, l’égalité des chances se construit pas à pas depuis la maternelle jusqu’à la fin du CE2.

    La mission Bentolila met en lumière l’importance, dans le cursus scolaire, du temps consacré aux comptines, ainsi que la nécessité d’un apprentissage basé sur des écrits de bonne qualité littéraire, et non pas sur des textes « fort médiocres » (je cite). Il est affligeant d’avoir mis si longtemps à prendre conscience de cette triste réalité. En vérité, seuls les enfants qui auront eu le privilège d’évoluer dans un milieu familial dont l’usage de la langue française n’est pas atrophié, disposeront d’une chance d’aborder les apprentissages de l’école primaire sur les deux jambes. Les autres trébucheront dès les premières semaines. Parmi eux, certains se relèveront, mais d’autres seront traînés de classe en classe en attendant l’âge légal de fin de la scolarité obligatoire…

    Voici quelques extaits du rapport remis au Ministre de l’Éducation nationale : « Les temps consacrés aux comptines et aux chants doivent devenir des temps d’apprentissage où l’on privilégiera la qualité d’articulation, de mémorisation, d’explication du lexique, plutôt que la quantité de comptines marmonnées. […] Disons enfin que tous les textes ne se valent pas et qu’il en est de superbes et de fort médiocres. En la matière, la “modernité” n’est pas toujours une garantie ; certains textes et poésies classiques charmeront les oreilles et les esprits de jeunes enfants plus sûrement que certains albums de littérature jeunesse. En bref, l’école maternelle doit commencer à créer les fondements d’un patrimoine littéraire de qualité. Le nécessaire labeur qu’ils entreprendront au CP, sera ainsi éclairé par la claire conscience qu’il leur promet des découvertes magnifiques des images merveilleuses qui n’appartiendront qu’à eux mais qui devront tout au texte et à son auteur. »

    Un très long passage est consacré aux « enfants venus d’ailleurs ». La mission évoque l’existence d’« un risque transculturel pour tout enfant de migrant ». Elle soulève également la question de la compatibilité culturelle entre l’école et la maison pour ces « enfants venus d’ailleurs » : « Il est temps que parents et enseignants s’accordent ensemble, au sein de chaque établissement, sur les termes d’une compatibilité culturelle entre l’école et la maison. » Comme la sociologue Nicole Mosconi[1], la mission affirme que « Le rapport au savoir des familles est lié à la représentation de l’enfant, de sa nature, de ses besoins, de ses compétences. Mais le rapport au savoir que l’enfant doit habiter pour pouvoir apprendre est celui de l’école française. »

    Le rapport recommande alors, et c’est en effet très sage, de réduire le conflit lié au risque transculturel entre l’école et la maison : « […] pour penser la prévention du risque transculturel auquel est soumis tout enfant de migrants. Tout d’abord, diminuer le conflit entre l’école et la maison, les deux lieux d’appartenance de l’enfant. Il s’agit parfois de logiques qui se posent comme antinomiques et qui cherchent à s’exclure ou du moins qui entrent dans un rapport de force stérile. Pour permettre à l’enfant d’acquérir le savoir nécessaire, il ne s’agit pas de changer sa nature, de le rendre pareil à ses enseignants ou à des normes qui seraient celles de la société d’accueil. »

    Malheureusement, la voie que préconise d’emprunter la mission Bentolila démontre qu’elle n’a pas encore bien saisi les véritables difficultés que rencontrent les enfants issus de l’immigration dans leurs parcours personnels, et qui entraînent l’exclusion du plus grand nombre d’entre eux d’une réelle « égalité des chances ». Ainsi, la mission recommande de « créer aussi des espaces de pensée de l’altérité à travers l’ouverture de l’école sur les réalités sociales et culturelles de la France, pays de métissages. Ceci peut se faire à travers le soutien d’activités parascolaires en relation avec les multiples origines culturelles des enfants de la seconde génération : ateliers de langues, d’écriture, de calligraphie, d’histoire… »

    Savez-vous qu’en France, des formulaires de renseignements remis en début d’année aux élèves des écoles primaires demandent aux parents s’ils souhaitent que leur enfant reçoive un enseignement de sa langue et sa culture d’origine ? Quand prendra-t-on conscience du fait que le seul référentiel culturel qui est aujourd’hui, contrairement à naguère, transmis aux enfants issus de l’immigration par leurs propres familles, est celui de leur pays d’origine, et que pour aider ces enfants à s’insérer dans la société française, l’école a donc une toute autre mission à accomplir auprès d’eux que d’abonder dans le sens des familles ? Le plus souvent, pour toutes les raisons que j’ai abordées dans « Le puzzle de l’intégration », ces dernières n’ont elles-mêmes aucune possibilité d’accompagner leurs enfants sur ce chemin de leur insertion. Vous aurez remarqué que j’évoque ici l’insertion, et non pas l’intégration. Quand notre personnel politique réalisera-t-il que c’est bel et bien la carence de transmission de la culture du pays d’accueil qui creuse le tombeau des enfants issus de l’immigration, et de la France par voie de conséquence ?

    Je terminerai en citant le sociologue Alex Mucchielli : « La notion de mentalité (système culturel) recoupe d’ailleurs entièrement le concept de culture intériorisée. Une mentalité c’est un ensemble d’acquis communs aux membres du groupe. Ces acquis, comme dans le cas de la culture intériorisée, servent de références permanentes et inconscientes pour la perception des choses, pour les évaluations faites et interviennent dans l’orientation des conduites. Une mentalité porte en elle une vision du monde et génère des attitudes (c’est-à-dire des manières d’être envers les choses) concernant les éléments de l’environnement. Ces éléments de l’environnement ne sont pas n’importe lesquels. Ce sont les éléments clés de la vision du monde : les référents essentiels de l’identité. Ces éléments importants par rapport auxquels le groupe a pris position sont les éléments dits nodaux, points d’ancrage de son identité. »[2]

    ____________________________

    [1] Nicole Mosconi, Jacky Beillerot, Claudine Blanchard-Laville, « Formes et formations du rapport au savoir », Savoir et formation - L’Harmattan, juin 2000.

    [2] Alex Mucchielli, « L’identité », Que sais-je? - PUF, 1986.

    Catégories : Éducation - instruction, Insertion - intégration
  • La « tolérance zéro », une fausse bonne idée

    Il est confortable, et séduisant aussi, d’imaginer qu’en sanctionnant toute infraction, à commencer par la plus minime, on pourrait prévenir les suivantes, dissuader ceux qui n’ont pas encore franchi le pas et guérir ainsi une société malade d’insécurité.

    Mais tout d’abord, comment mesurer l’efficacité d’une politique dont l’ambition est de lutter contre la violence et le sentiment d’insécurité qu’elle induit ? Autrement dit, qu’attendons-nous d’une politique efficace ? Est-ce la réduction durable du nombre d’actes de délinquance, ou est-ce l’éviction des éléments perturbateurs de l’espace public, afin de les mettre « hors d’état de nuire » ? Si c’est ce dernier objectif qui est retenu, dans la mesure où les délinquants finissent un jour ou l’autre par sortir de prison, à l’évidence ils réapparaitront tôt ou tard dans l’espace public. La sanction les aura-t-elle alors dissuadés de récidiver ? Autrement dit, la sanction les aura-t-elle responsabilisés ?


    L’échec de l’expérience américaine

    La politique de « tolérance zéro », dite aussi théorie du « carreau cassé » ou de la « vitre brisée », a vu le jour aux États-Unis au début des années 1980, avant d’être progressivement exportée vers d’autres contrées, dont l’Europe. Ce sont les chercheurs James Q. Wilson et Georges Keeling qui ont formalisé cette théorie. Elle postule que tout « désordre » non traité peut dégénérer en actes de délinquance très graves. Ainsi, tout graffiti, toute incivilité seraient susceptibles de conduire leurs auteurs sur la voie de la grande délinquance, voire du crime. Aucune explication d’un tel cheminement, d’ailleurs largement invalidé par les statistiques, n’est avancée par les auteurs pour étayer leur théorie.

    Un rapport publié en novembre 2007 par le JFA Institute, cercle de réflexion basé à Washington aux travaux duquel participent des criminologues de compétence reconnue, vient à nouveau de rappeler que la politique de « tolérance zéro » n’avait eu aucun impact sur le niveau de criminalité aux États-Unis, qui est à ce jour le même que celui qu’on enregistrait dans les années 1970. Pourtant, pour défendre une prétendue réussite, les défenseurs de cette politique donnent très souvent en exemple le cas de la ville de New-York, où la délinquance aurait diminué. Qu’en est-il en réalité ? Les nombreux sociologues américains qui se sont penchés de manière approfondie sur l’analyse de la situation à New-York avancent plusieurs explications, parmi lesquelles :

    • les forts taux d’incarcération mettent les délinquants temporairement hors circuit ;
    • la délinquance s’est déplacée vers des zones moins protégées que New-York, mais elle ne s’est pas résorbée. Les délinquants ou auteurs d’incivilités qui empoisonnent la vie quotidienne des citoyens, partent en effet effectuer leur commerce illicite ou leur atteinte aux autres, dans des lieux moins protégés. Le taux de criminalité dans les petites villes, lui, n’a pas baissé ;
    • la démographie a évolué à New-York, où le nombre de jeunes a baissé ;
    • l’apparition d’une véritable prise de conscience de la fraction des jeunes qui ont assisté aux ravages de la cocaïne parmi leurs proches (parents, amis ou voisins), les dissuadant de verser eux-mêmes dans la toxicomanie. La consommation de cette drogue a diminué, réduisant de ce fait le trafic de stupéfiants qui s’accompagnait de nombreux actes de délinquance ;
    • dans d’autres villes et sur une même période, on observe également une diminution temporaire du taux de délinquance, alors que ces villes n’appliquaient pas de politique de « tolérance zéro ».

    Le rapport du JFA Institute s’alarme du fort taux d’incarcération aux États-Unis. Avec la politique de « tolérance zéro », les prisons ont vu leurs effectifs augmenter dans de très fortes proportions, d’une part parce que les peines infligées sont de plus en plus longues, d’autre part parce qu’il y a de moins en moins de recherche de sanctions alternatives à l’enfermement. L’effet dissuasif tant espéré de politiques fortement répressives ne s’est donc jamais produit. Citons les chiffres américains : le taux d’incarcération était de 125 pour 100 000 dans la période 1925-1975. Il a fait un bond pour passer à 700 pour 100 000 dans les années 1980, et n’a pas décru depuis. Pour mémoire, rappelons que le taux d’incarcération en France se situe à environ 90 pour 100 000.

    La raison de l’échec de la politique de « tolérance zéro » réside dans la non-adéquation de la réponse apportée au travers de l’enfermement. En effet, cette réponse ne travaille que sur le très court terme. Si cette théorie fut adoptée si promptement, c’est que son caractère simpliste et son immédiateté a séduit les hommes politiques qui souvent, et pas simplement dans notre pays, sont à l’affût de baguettes magiques. Il s’agit véritablement là d’une approche qui s’apparente à de la prestidigitation : un problème surgit, il est aussitôt éliminé du champ visuel des électeurs. On ne s’interroge malheureusement que très rarement sur les retombées sur la société de mesures si radicales. On oublie également de développer une vision de long terme, qui exigerait inévitablement une réflexion un peu plus poussée au sujet des actions à développer très en amont, afin de réduire la masse de problèmes à traiter en aval. L’objectif devrait être de tarir les sources des différentes formes de violence, et ces sources sont multiples. Elles ne sont, il faut le souligner, pas toujours identiques d’un pays à l’autre.

    La politique de « tolérance zéro » présente par ailleurs le défaut majeur de conduire à l’abandon de la philosophie qui consiste à toujours travailler à l’identification de voies qui permettraient à l’être humain d’œuvrer à sa propre réhabilitation. Cette politique abandonne aussi, dans le même temps, la dimension de dissuasion. Nous le vérifions aujourd’hui en France : la loi sur la récidive, avec l’instauration de peines planchers, est tout simplement impuissante. Il est capital de réaliser qu’il ne peut y avoir à ce problème de réponse simpliste à effet immédiat.


    Alors, que faire ?

    En abordant la réponse à cette question, nous allons mieux comprendre pourquoi la politique de « tolérance zéro » ne peut conduire à une diminution réelle de la délinquance, alors qu’elle concourt à banaliser l’acte d’emprisonnement. Celui-ci constitue malheureusement à présent, pour certains délinquants, dans notre pays, une marque de valorisation au sein de leur groupe.

    Pour traiter le problème spécifique de la violence dans notre société, dans laquelle la forte implication des enfants issus de l’immigration n’est plus à démontrer, plusieurs axes doivent être déployés de concert. Je les ai parsemés au long du Puzzle de l’intégration : les pièces qui vous manquent, en donnant à chaque fois les raisons profondes. Les relations de cause à effet y ont été développées de façon que le lecteur puisse ensuite, avec son propre jugement, participer à porter un regard critique et constructif sur les débats qui agitent l’ensemble de notre classe politique. Je ne vous livre ici que quelques-uns de ces axes, et vous renvoie à mon livre pour compléter cette liste et approfondir le sujet :

    • L’abandon de la théorie de la victimisation est une absolue nécessité : se reporter au contenu de mon livre pour comprendre le poison que cela constitue pour les enfants issus de l’immigration, et la haine que cette « attitude » instille dans le cœur et l’esprit des familles issues de l’immigration.
    • La responsabilisation des parents des délinquants mineurs est incontournable. Il est indispensable qu’ils assument, vis-à-vis de la société, leurs responsabilités en cas de mauvais agissements de leurs enfants. Il faut appliquer le principe de « tolérance zéro » sur un point : les parents de délinquants mineurs doivent financièrement, ou par le biais d’actions de restauration, participer à la réparation des dégâts matériels commis par leurs enfants. Eu égard à une certaine « sensibilité » au matériel, les « jeunes » réfléchiraient à deux fois avant de saccager. Cela enclencherait à terme un cercle vertueux. J’explique également dans mon livre les raisons, liées à la sociologie des groupes, pour lesquelles le fait de « toucher » les ascendants contribuera à ramener plus facilement leurs enfants dans le rang.
    • Les sanctions appliquées directement aux « jeunes » doivent avoir une visée réparatrice et éducative. Elles doivent systématiquement prévoir un accompagnement en vue d’une insertion dans la société. Je ne parle pas de « réinsertion » car souvent, ces « jeunes » ne sont pas même insérés dans la vie sociale française. Nos juges le savent fort bien, mais le manque de moyens de notre Justice conduit à ce que l’immense majorité de ces peines éducatives ne sont tout simplement jamais appliquées.
    • Il faut remettre à l’ordre du jour, dans toutes les écoles maternelles et primaires de France, une grande ambition dans la transmission de la langue française, qui est la langue officielle de la République, mais que les enfants issus de l’immigration pratiquent de moins en moins, et donc de plus en plus mal. Cet apprentissage est essentiel, car c’est à travers la langue et par le biais de la littérature que seront transmises, à ceux des enfants qui n’y ont pas accès dans leur environnement familial, la culture et les règles de savoir-vivre propres à la société française.
    • La sensibilisation à la culture française doit veiller à inclure tout ce qui n’est que peu, voire pas du tout, transmis au sein des familles, à commencer par l’art sous toutes ses formes. C’est cela qui participera à ouvrir les enfants issus de l’immigration à d’autres cultures que celle de leur milieu familial. De plus, en développant le registre de la sensibilité, la culture artistique participe à adoucir, à pacifier, mais aussi à appréhender le respect de l’être humain dans sa dimension individuelle, et pas seulement dans sa dimension collective comme c’est le cas par exemple dans les sociétés maghrébines ou africaines. Loin d’être futile, cette préoccupation est en réalité centrale, car c’est autour de ce noyau que se cristallisera ou non la possibilité d’une cohabitation dans l’espace public. Cette sensibilisation doit se dérouler tout au long de l’école maternelle et primaire. Au collège, il est en géréral bien trop tard.
    • Il faudra cesser d’encourager fiscalement les familles à délocaliser leur argent vers leur pays d’origine (lois Sarkozy 2006 et Hortefeux 2007). Les fonds transférés sont autant de ressources qui ne seront pas consacrées par les parents à l’insertion de leurs enfants dans la société française. L’aide au développement devrait toujours se faire directement d’État à État, assortie bien entendu de contraintes sur l’affectation des fonds, ou par interventions directes sur des projets.
    • La lutte contre l’économie parallèle est essentielle, pour des raisons évidentes que j’ai déjà évoquées dans un précédent billet. Il est capital dans ce dossier de toujours accompagner la sanction d’enfermement de la privation du « butin », sans quoi cette sanction n’a aucune incidence. Passer quelques années en prison, lorsque cela n’empêche pas de disposer et/ou de faire disposer son entourage d’une amélioration substantielle du niveau de vie, n’est en rien dissuasif.
    • Il faut rouvrir la discussion sur le droit du sol, comme l’avait souhaité Jacques Chirac il y déjà vingt ans. « Le puzzle de l’intégration : les pièces qui vous manquent » expose en détail les raisons pour lesquelles le droit du sol s’apparente à une forme de colonisation. La violence de nombreux « jeunes », qui crient à la moindre occasion leur haine de la France, aurait déjà dû alerter sur la souffrance morale et psychologique que leur fait endurer cette identité que la France leur impose ; la France ne recueille finalement que la monnaie de sa pièce. Sur un sujet aussi délicat, il est important de garder à l’esprit que la souffrance et l’incompréhension sont aussi vives du côté des Français de souche que de celui de nombre d’enfants issus de l’immigration, réputés Français mais qui ne se pensent ni ne se vivent comme tels, et c’est leur droit le plus absolu. Le fait que les parents des deux adolescents décédés dans l’accident de Villiers-le-Bel aient souhaité les enterrer dans leur pays d’origine est bien plus éloquent qu’une montagne de discours. L’appartenance à une terre ne se décrète pas, et ne se décrétera jamais ; elle ne devrait jamais être imposée à quiconque. Pour cette raison, les questions matérielles doivent être définitivement décorrélées des questions identitaires, et la question de l’identité doit être traitée avec le sérieux et le respect qu’elle mérite, car à travers elle c’est le destin d’un peuple qui se joue.

    Je n’aurai abordé dans ce billet qu’une petite partie des raisons pour lesquelles la politique de « tolérance zéro » est simpliste et réductrice, et ne peut répondre à la violence dans notre société. Je n’aurai pas non plus abordé ici la question du coût financier de cette politique pour le contribuable ; il est si lourd que de très nombreux États américains envisagent à présent de le faire supporter par les détenus eux-mêmes.

    Pour clore, provisoirement, ce sujet, je souhaite signaler que l’instauration dans certaines villes des États-Unis d’une police qui s’apparente à une police de proximité s’y est accompagnée de l’apparition d’une certaine corruption. C’est un phénomène qu’il ne faut pas négliger, si une volonté politique de tisser des liens de proximité avec la population passe, comme certains le préconisent, par le recrutement de policiers au seul motif qu’ils connaîtraient bien les habitants des quartiers et même qu’ils en seraient eux-mêmes issus. La Police républicaine doit continuer d’avoir pour mission essentielle de faire respecter les lois de la République. Il est choquant de suggérer que seuls des policiers connus des habitants mériteraient le respect qui leur est doublement dû en tant que représentants de l’État. Sur ce point, je rejoins la position adoptée par le Premier ministre François Fillon au sujet de la récurrente controverse autour de la création d’une police de proximité : ce n’est pas à la population de choisir sa police, et comme je l’ai exprimé dans mon livre, ce n’est nullement un hasard si tous ceux qui symbolisent un tant soi peu la République sont devenus, ces dernières années, cibles d’actes de violence, verbale ou physique. Il faudra un jour que, dans l’intérêt de tous, Français de souche et enfants issus de l’immigration, nous réalisions que la plupart des « jeunes » qui avaient participé aux échauffourées des banlieues en novembre 2005 n’avaient aucun antécédent judicaire, et que l’explication du malaise par la question sociale est une totale imposture.

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  • Quand l’OCDE éclaire la France sur la carte scolaire

    À la mi-septembre, L’OCDE a rendu public son rapport sur l’éducation. À cette occasion, Éric Charbonnier, analyste au service Éducation de l’OCDE, déclarait, au sujet de la carte scolaire : « Ce qui est clair, c’est que de nombreux pays ont essayé de modifier ou d’aménager leurs cartes scolaires, et vous avez différentes politiques, différents résultats. Vous prenez la Nouvelle Zélande, ils avaient un système similaire à la France, ils ont essayé de supprimer la carte scolaire et ils ont vu les inégalités augmenter, car les jeunes qui avaient les meilleurs résultats dans les écoles en difficulté changeaient d’école et la mixité sociale diminuait. »

    J’avais déjà évoqué ce sujet dans Le puzzle de l’intégration, mettant en garde contre une approche superficielle qui minimiserait les stratégies de contournement déployées par les familles qui en auraient la possibilité. J’y développais, entre autres, les raisons pour lesquelles le fait d’accorder aux meilleurs élèves (les « locomotives » de classe) la faculté de déroger à cette carte, aggraverait considérablement la situation de tous les autres enfants, précipitant de fait dans une plus grande détresse éducative les établissements délaissés, et poussant leurs quartiers vers une plus grande « ghettoïsation », accentuant ainsi la ségrégation territoriale. C’est pourquoi nous devons, bien au contraire, nous interroger sur les raisons profondes qui amènent des parents à ne croire au salut de leurs enfants qu’au travers du contournement de la carte scolaire. Nous devons travailler à éliminer les raisons qu’ont ces parents de soustraire leurs enfants des établissements scolaires de leurs quartiers. Aussi bien, toutes les études sont formelles sur ce point : ce n’est jamais de gaieté de cœur que les parents font fuir à leurs enfants l’école la plus proche de leur domicile.

    Alors, la suppression de la carte scolaire est-elle aussi un miroir aux alouettes ? Je le pense. C’est d’autant plus regrettable que celui-là ne sera pas exempt d’effets pervers.

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