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La CNIL dit à nouveau «NON» au comptage ethnique

Après avoir conduit une soixantaine d’auditions de mouvements associatifs, de chefs d’entreprise, de chercheurs, d’organisations syndicales, de représentants des religions…, la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) vient de réitérer son opposition au comptage ethnique dans notre pays. La CNIL est composée de 17 membres : 4 parlementaires, 2 membres du Conseil économique et social, 2 conseillers d’État, 2 conseillers à la Cour de cassation, 2 conseillers à la Cour des comptes, 5 personnalités qualifiées (1 désignée par le Président de l’Assemblée nationale, 1 par le Président du Sénat, 3 par le conseil des ministres).

Depuis plusieurs années, des personnalités politiques aussi bien que des associations réclament que la France rompe avec sa tradition de non-référencement des citoyens selon leur ascendance ethnique ou raciale. Ce référencement est utilisé dans certaines sociétés anglo-saxonnes, qui affichent pourtant, faut-il le rappeler, un échec patent sur la question de l’intégration. Interrogeons-nous donc : pourquoi ce référencement devriendrait-il alors porteur de solution politique aux problèmes de l’intégration dans notre pays ?

En France, la raison qu’avancent fréquemment les promoteurs du comptage ethnique est qu’il serait impossible de mesurer l’efficacité des mesures politiques mises en œuvre par l’État sans de tels étiquetages. Or, cette approche est le plus souvent purement tacticienne, et vise en réalité à ce que soient jetés de manière officielle les premiers jalons de la communautarisation de la France, prélude à la demande d’actions correctives au profit des membres des minorités, dont la discrimination positive est la meilleure illustration. Les Français étant très attachés au traitement égalitaire des citoyens, la technique consiste à présent à ne plus les affronter de face, mais bien à contourner leur opposition à l’instauration de mesures de faveur destinées à des minorités ethniques ou raciales qui s’estimeraient lésées.

Dès 2004, Claude Bébéar, Président de l’Institut Montaigne, avait remis au Premier ministre Jean-Pierre Raffarin un rapport intitulé « Des entreprises aux couleurs de la France » où l’on trouvait la justification de l’utilité supposée de la mise en place d’outils statistiques (traduire le catalogage des citoyens français selon leurs origines ethniques ou raciales).

Jusqu’à présent, de nombreuses personnalités politiques, mais également la CNIL, l’INED ou des associations (dont SOS Racisme), ont veillé à ce que ces fichages ne soient pas pratiqués. SOS Racisme affirme : « Nous refusons d’apporter des solutions faciles et discriminantes comme la discrimination positive ou le comptage ethnique. Car sous couvert de vouloir lutter contre les discriminations, en réalité ces mesures stigmatisent et enferment les individus dans des catégories ethniques qui ne peuvent pas avoir de sens dans un pays aussi métissé que le nôtre ». Combien de temps ces bonnes volontés républicaines tiendront-elles encore face aux assauts répétés et incessants des partisans de la subdivision de la France en communautés ? Cela dépendra éminemment du niveau de vigilance des Français, qui devront prendre conscience que ces mesures équivalent à un ver qui serait introduit dans le fruit. L’avis de la CNIL n’a pas force de loi ; nos gouvernants peuvent parfaitement décider de ne pas en tenir compte. Il faudra donc lutter, à tous les niveaux, contre cette tentation qui anime certains lobbies et responsables politiques, influencés en cela par certaines associations, dont le CRAN (Conseil Représentatif des Associations Noires), qui ne perçoivent pas toujours le danger de tels fichages. La lutte contre la communautarisation de la France passe inévitablement par la mise en échec des mesures de comptage ethnique.

Autre interrogation : quel traitement réservera-t-on à tous ceux qui, issus des dernières vagues d’immigration, se sont parfaitement intégrés et ne tiennent pas à ce qu’on les renvoie vers une autre communauté que la communauté nationale française ? Si les fichages ethniques, préludes à l’instauration de la discrimination positive, deviennent effectifs, se revendiqueront-ils néanmoins, comme c’est le cas aux États-Unis, de leur communauté d’origine, pour épargner à leurs enfants et à eux-mêmes les contraintes auxquelles sont soumis les autres citoyens français ? Demandera-t-on à chacun d’entre eux leur avis sur une question si lourde de conséquences ? N’est-ce pas là un formidable gâchis de l’intégration, que de pousser ceux qui sont déjà intégrés à ne plus l’être ? En clair, ces personnes, qui étaient et se sentaient déjà françaises, redeviendront des Français d’origine maghrébine, africaine, etc, puisque les employeurs devront bien afficher leur quota de « minorités visibles » afin de ne pas encourir le risque d’être accusées de pratiques discriminatoires. Les directeurs des ressources humaines, assistés de leurs juristes, qui auront la responsabilité d’afficher la composition de leurs effectifs, sauront bien se rappeler qui, parmi leurs salariés, avait un ancêtre maghrébin, africain…, même après plusieurs générations. Ainsi, ces Français demeureront des Français d’origine étrangère et ne deviendront jamais des Français tout court, c’est-à-dire, ne nous voilons pas la face, de « vrais Français » !

Certes, des discriminations existent, mais l’obsession actuelle, qui vise à les imputer toutes à des considérations raciales, incitent ceux qui s’estiment lésés pour quelque raison que ce soit à en rechercher la cause dans leur origine ethnique ou raciale. Pour les mêmes effets, un Français d’ascendance européenne aurait tendance à en rechercher les raisons dans la qualité de son CV (pour un refus de recrutement), ou dans la sécurité financière qu’il présente (pour la location ou l’achat d’un bien immobilier). Certains employeurs signalent d’ores et déjà qu’ils n’osent plus parler ouvertement de leurs aptitudes professionnelles à leurs employés d’ascendance maghrébine ou africaine, de peur d’être taxés racistes ! Gageons que ces crispations engendrées dans le monde économique contribueront à ce que les employeurs hésitent à recruter des personnes d’origine maghrébine ou africaine, avec lesquelles ils ne peuvent plus désormais disposer de la qualité de communication indispensable au bon fonctionnement d’une équipe.

Ériger spontanément en victimes de discriminations les membres des populations d’origine immigrée qui rencontrent des problèmes d’insertion économique ou d’intégration à la communauté nationale est par ailleurs contre-productif, car cela les enferme inéluctablement dans un état de déresponsabilisation qui les empêche de prendre en main leur destin pour devenir moteurs de leur insertion et de leur intégration. Ainsi, occulter aux enfants de l’immigration qu’ils ont un rôle actif à jouer et des perches à saisir, c’est ruiner définitivement leurs chance de s’intégrer.

La France est aujourd’hui entrée dans une zone de très fortes turbulences, où se trouvent menacés des éléments du socle qui assure sa stabilité, son indivisibilité, et par extension sa paix civile. Il est nécessaire que tous ceux qui attachent un prix à la paix civile demeurent vigilants, afin d’éviter que des mesures politiques lourdes de conséquences pour la quiétude de notre pays ne soient mises en œuvre. Le règlement des difficultés liées à l’intégration est un traitement de longue haleine. Il devra passer par la prise de conscience que l’école républicaine doit jouer un rôle central auprès des enfants qui ne disposent pas, au sein de leur environnement familial, des facilités qui leur permettraient de se développer harmonieusement en vue de réussir à s’insérer dans la société française. Cela passera obligatoirement par la prise de conscience que leurs parents doivent assumer leur responsabilité éducative auprès de leurs enfants, avec pour objectif de les rendre réceptifs aux enseignements transmis par leurs enseignants ; cela est très loin d’être acquis, et c’est là l’une des sources majeures des difficultés que doivent malheureusement affronter les enfants issus de l’immigration, qu’ils soient de première, deuxième ou troisième génération.

Catégories : Discrimination positive, Éducation - instruction

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