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  • C’est le pays qu'on enchaîne

    « La liberté a souvent hélas le goût du sang versé. L'histoire de notre pays l'enseigne » (le Président de la République, cérémonie d'hommage aux treize militaires morts au Mali. Invalides, 2 décembre 2019)

    Le verbe est haut, mais qu'en est-il des enseignements tirés de l'Histoire ?

    Le texte liberticide qui vient d'être voté, porté par la députée Laetitia Avia, est une action qui vient s'ajouter à tant d'autres. Et contrairement à ce qu'écrit Vincent Trémolet de Villers dans son éditorial pour le Figaro, la censure de la liberté d'expression n'est jamais pavée de bonnes intentions. Surtout, n'oubliez jamais le message porté par le vœu du résistant Marc Bloch : « Un jour viendra, tôt ou tard, j’en ai la ferme espérance, où la France verra de nouveau s’épanouir, sur son vieux sol béni déjà de tant de moissons, la liberté de pensée et de jugement. » (l’Étrange défaite, septembre 1940)

    « Le “nous” est fragilisé. Il craque. L’unité nationale s’enfuit, sacrifiée sur l’autel d’un vivre-ensemble qui a été dissocié des fondamentaux culturels du peuple français. Celui-ci n’a pas voix au chapitre. Réduit au silence, il observe la France se décomposer sous ses yeux. (...) La France et sa République ne se meurent pas tant de la force de leurs adversaires que de la faiblesse de leurs partisans. Ce n’est pas la République qui a échoué, mais l’État. Ce n’est donc pas à la République de cesser de reculer, mais à l’État, garant de l’unité, de cesser de faire reculer la République. » (Décomposition française, Prix de la Société des Membres de la Légion d'Honneur)

    Laetitia, un prénom français, à faire pâmer de joie Éric Zemmour ! Pas comme le mien, “une insulte à la France”. Approche binaire digne d’un Jean-Marie Le Pen à ses heures de gloire. Du pain bénit pour tous ceux qui, depuis François Mitterrand, ont besoin d’épouvantails pour empêcher que certains sujets cruciaux ne soient véritablement traités.

    Ci-dessous, mon intervention dans l’émission Moi président sur France Info (16 mars 2017). Le peuple français subit une régression bouleversante. 

    Olivier de Lagarde :

    Notre présidente aujourd’hui est essayiste d’origine algérienne, ancien membre du Haut Conseil à l’intégration : Malika Sorel-Sutter.

    Malika Sorel :

    Moi présidente, je sanctuariserai la liberté d’expression. Aucune loi ne pourra venir la restreindre. Comme Marc Bloch en 1940, je considère en effet que la survie de la nation dépend de la liberté de pensée et de jugement.

    — Attendez, là, Malika Sorel je vous arrête. La liberté d’expression, vous trouvez vraiment qu’elle est en danger dans la France de 2017 ?

    — Absolument ! Depuis un certain nombre d’années des lois sont venues restreindre cette liberté d’expression qui est, certes, inscrite dans notre Constitution mais que la loi est venue régulièrement restreindre et – dernière tentative en date pour la restreindre encore davantage – la loi « Égalité et Citoyenneté » qui souhaitait diminuer les droits et la liberté des journalistes. J’estime pour ma part que ce sont des régressions démocratiques qui nous poussent, nous, dans le monde intellectuel, et y compris dans le monde politique, à nous autocensurer en permanence et à taire un certain nombre de vérités qui auraient été très utiles au débat pour faire en sorte que nous traitions des sujets qui sont extrêmement importants pour notre société.

    — De quelles vérités voulez-vous parler ?

    — Je vous donne un exemple : si aujourd’hui Alexis de Tocqueville devait publier ses Notes sur le Coran, il ne pourrait pas les publier. Albert Camus disait que « Mal nommer les choses ajoute au malheur du monde ». Aujourd’hui on nous empêche d’exprimer la réalité des choses. Il y a ce que Jean Sévillia a appelé « le terrorisme intellectuel », le fait qu’un certain nombre de groupes associatifs font peser des menaces très précises de traîner des personnes en justice dès qu’elles vont, à leur goût, dépasser une certaine forme de Politiquement Correct qui s’est installée, qui nous empêche de dire les choses. Et il y a eu une évolution dans nos lois. Il y a eu la loi Pleven qui est venue resserrer la loi de 1881, une loi qui était très bien faite, et qui faisait que nous ne pouvions finalement poursuivre que ceux qui appelaient nommément à la perpétration d’actes violents contre les personnes ou les groupes de personnes ou la destruction d’objets matériels. Aujourd’hui on subjective : dès qu’on vous soupçonne de vouloir diffamer on peut vous traîner en justice.

    — Malika Sorel, vous êtes d’origine algérienne. Pour vous la stigmatisation dont parfois les personnes issues de l’immigration sont les victimes, c’est pas quelque chose de dérangeant ?

    — Ça doit être versé au débat public. À partir du moment où nous ne sommes pas d’accord avec certaines affirmations, nous pouvons débattre. C’est la force de notre démocratie de pouvoir verser un certain nombre de sujets dans le débat public. Chacun vient avec son argumentaire. Et puis nous essayons, finalement, en nous disputant mais de manière civilisée, nous essayons de faire progresser la connaissance de manière à ce que l’opinion publique passe d’une opinion à une connaissance établie, étayée. Dans la mesure où on prévient, où on empêche toute discussion, tout débat, on fige notre société et on aboutit à ce qu’il y ait une sclérose de la pensée.

    — Mais jusqu’où doit aller cette liberté ? Est-ce que, par exemple, vous ne trouvez pas qu’il faut interdire le négationnisme ou l’apologie de la haine raciale ?

    — Je pense qu’il faut, exactement comme dans le Premier Amendement de la Constitution américaine, inscrire le fait qu’il n’y a aucune limitation possible de la liberté d’expression qui puisse être faite par une loi. C’est-à-dire tant que vous n’incitez pas les personnes à s’attaquer de manière physique aux personnes ou de détruire des objets, nous devons laisser l’expression s’établir.

    — Même le négationnisme ?

    — Il est très facile de montrer que toutes ces pensées négatives sont profondément risibles. On peut les démonter. Nous avons les arguments de notre côté. Souvenez-vous : il y a quelques années, Pierre Nora et Robert Badinter avaient signé un texte dans le cadre de l’association « Liberté pour l’histoire ». Ils s’insurgeaient justement contre un certain nombre de lois qui venaient – donc la loi Gayssot, la loi Taubira – qui venaient à chaque fois restreindre la liberté de pensée et de jugement. Parce que c’est ça qui est en jeu. Au-delà de la liberté d’expression, c’est le fait de permettre à notre société de continuer de réfléchir. Lorsque vous poussez les penseurs, même n’importe quel citoyen, à s’autocensurer, à s’empêcher de réfléchir, vous faites que notre société se fige et c’est la liberté de création, au bout du compte, et d’examen, d’analyse, de jugement qui est mise en péril.

    — Merci, Malika Sorel-Sutter.

    Catégories : Politique
  • Communautarisme : vers un point de non-retour ?

    Le propos du Président Macron est sans ambiguïté : « quand on éduque nos enfants, on demande qu’il n’y ait pas de signe religieux ostentatoire ». Le problème est simple : soit les sorties scolaires font partie de la scolarité et sont un temps où « on éduque nos enfants », auquel cas « on demande qu’il n’y ait pas de signe religieux ostentatoire ». Soit elles n’en font pas partie, alors elles n’ont strictement rien à faire dans ce temps-là.

    Mais s‘agit-il seulement d’une question de laïcité ? Comme l’a précisé Tahar Ben Jelloun sur France Culture : « le corps de la femme est le principal objet de fixation chez certains musulmans, qu’ils soient chiites ou sunnites. C’est pour cela qu’on cherche à ce que le corps des femmes ne s’exprime pas, qu’il ne se dévoile pas, qu’il ne soit pas libre. Alors, on le cache. » En 1954, la première demande formulée à Gamal Abdel Nasser par les Frères musulmans fut de voiler les femmes. Inimaginable pour le progressiste Nasser ! Emmanuel Macron s’interroge : « Mais pourquoi cela nous insécurise, ce voile ? C’est que ça n’est pas conforme à la civilité qu’il y a dans notre pays. C’est-à-dire aux rapports qu’il y a entre les hommes et les femmes dans notre pays. Nous sommes attachés, et ça c’est très républicain, c’est même révolutionnaire, à cette égalité entre l’homme et la femme. » Le problème que soulève le couvrement des femmes est loin d’être anecdotique, en ce qu’il dessine le projet de société et l’éthique qui le sous-tend.

    Depuis trente ans, les pressions pour le port du voile ne cessent de s’intensifier. Dans son rapport pour l’Institut Montaigne « un islam français est possible », l’auteur Hakim El Karoui qui a conduit une enquête avec l’IFOP indique que 65% des musulmans en France y sont favorables, et que pour 29% des sondés la loi islamique (charia) est plus importante que la loi de la République. Nonobstant ce constat, le rapport propose un plan que l’écrivain Boualem Sansal juge dangereux : « Quand j’ai lu ça, je suis tombé à la renverse, j’ai compris que le plan était un programme d’arabisation et d’islamisation des plus sévères, il ne laissait aucune possibilité de faire machine arrière en cas de regret. Il ressemblait comme deux gouttes d’eau au plan d’arabisation et d’islamisation que le pouvoir algérien a mis en œuvre en Algérie au début des anées 80 sous la pression de l’Arabie saoudite et qui allait en peu de temps faire de nous des perroquets wahhabites salafistes. [1] »

    Le monde musulman vit dans la nostalgie de l’apogée de sa puissance. Cet âge d’or, c’est sa fierté, et la fierté y est un élément structurant. Indignes de respect sont ceux qui paraissent dépouillés de toute fierté, qui posent genou à terre tels les Occidentaux entraînés dans la repentance et la culpabilisation par leurs propres élites, et qui à présent se déchirent pour savoir s’il convient de ramener parmi eux les djihadistes. Nous n’avons pas fini de payer le prix de ce choc de perceptions.

    Au moment où s’ouvrait le débat sur l’immigration à l’Assemblée Nationale, Christophe Castaner reconnaissait que « nous avons loupé ces dernières années l’intégration telle que nous aurions dû la réussir ». Au long des dernières décennies, l’État – et non la France ni la République – n’a cessé d’entraver, voire de dissuader le processus d’intégration : importance des flux migratoires qui ont entraîné l’accroissement de la pression sur les personnes et un réenracinement dans les mœurs du groupe culturel d'origine ; déresponsabilisation des familles ; accommodements déraisonnables ; discrimination positive qui institue une inégalité en raison des origines, dans un pays où le principe d’égalité a été arraché par une révolution. L’État est allé jusqu’à introduire la finance islamique, comme le rappelle le portail de l’Économie, des Finances, de l’Action et des Comptes publics du gouvernement : « La finance islamique, conforme aux principes de la Charia, bénéficie d’aménagements fiscaux en France depuis 2008. » Aujourd’hui, en raison même de nombreuses fautes commises par nos élites de commandement, une part des descendants de l’immigration ne comprend pas ce qui lui est reproché et en souffre sincèrement. Dans les enquêtes de terrain menées par la sociologue Évelyne Ribert, il apparaissait de façon assez claire que dans l’esprit des jeunes de l’immigration, les papiers d’identité français n’engagent pas nécessairement leur propre identité. À qui la faute, si un certain nombre de vérités n’ont pas été dites ?

    Depuis Pierre Joxe ministre de l’intérieur, Les autorités se sont obstinées à vouloir organiser, financer, structurer l’islam en France. Leur projet ? Faire émerger un nouveau pouvoir tutélaire, une sorte d'imam suprême qui parle au nom d’une communauté qu’on voudrait voir unifiée, quand il faudrait s’atteler à créer les conditions de l’émergence d’une liberté individuelle. Et tout en œuvrant ainsi à communautariser encore davantage la société, pas un jour sans que ces mêmes autorités ne déplorent cette communautarisation. Que faire devant un tel degré d’incohérence ?

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    [1] Fondation Varenne, intervention de Boualem Sansal, 13 décembre 2016

    Catégories : Discrimination positive, Identité, Immigration, Insertion - intégration, Politique
  • Les élites politiques ne peuvent plus cacher l’ampleur du désastre dont elles sont à l’origine

    Mon entretien avec Alexandre Devecchio, publié sur FigaroVox: La non-assimilation aboutira à la mise en minorité des idéaux français sur notre propre sol.

     

    Catégories : Identité, Politique